Halte à la politique d’achat produits à prix cassés, encore amplifiée par un jeu de marges arrières plus ou moins occultes !
La massification des achats pratiquée depuis de nombreuses années atteint aujourd’hui ses limites, comme l’a brutalement rappelé l’épisode des « fraises surgelées importées de Chine » auquel est aujourd’hui confronté le géant de la profession, Sodexo. Après avoir consommé ces fruits dans environ 500 cantines, plus de 11.000 écoliers allemands ont été victimes d’intoxication alimentaire. Si Sodexo a réussi pour le moment à gérer au mieux cette crise sanitaire majeure, cette affaire oblige à s’interroger sur les pratiques achats des plus grands groupes de restauration.
Pourquoi des fraises chinoises surgelées ?
Sans aller jusqu’à soutenir qu’acheter des fraises chinoises surgelées revient à sacrifier la qualité et la traçabilité sur l’autel des prix bas, on peut cependant s’étonner sur les raisons d’un tel choix. La Chine est certes le premier producteur mondial de fraises. Mais qui ignore encore la faiblesse des contrôles sanitaires et bactériologiques qui y règnent ? Le pays n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai en matière de crise sanitaire, rappelez-vous les laits infantiles avec de la mélamine qui ont provoqué la mort de plusieurs nourrissons. Les contraintes fortes du transport entre la Chine et l’Allemagne – respect de la chaîne du froid – accentuent encore davantage un risque déjà fort pour un produit fragile et délicat.
Pourquoi, si ce n’est pour comprimer ses coûts ?
Pourquoi, a fortiori, alors que chacun revendique la mise en œuvre d’une politique de développement durable, ne pas privilégier les circuits courts et les achats de proximité, au moins au sein de l’U.E. où les régulations fixées par la Communauté Européenne sont plus strictes et les contrôles sanitaires plus réguliers ?
Qui est responsable ? La société de restauration ou le distributeur ?
Le deuxième débat ouvert par cet épisode est celui de la responsabilité. Le distributeur est-il un simple logisticien ou est-il également un sélectionneur de fournisseurs et de produits ? Quoi qu’il en soit, il s’agit bien au final de la responsabilité pleine et entière du restaurateur qui est en jeu. Au bout de la chaîne, c’est lui qui paiera les pots cassés. Les grands groupes de la restauration collective nourrissent en effet chaque jour des centaines de milliers d’enfants. à ce titre, il est de leur responsabilité de sortir de cette politique du moins-disant et des conséquences parfois désastreuses qui en découlent.
Bientôt, seules les collectivités autogérées pourront garantir transparence et qualité de leur politique achats.
Francis Luzin
Directeur de la publication