Les mythes ont la vie dure. Et le mythe du surgelé comme composant de seconde zone de la cuisine n’en finit pas de resurgir. L’émission Vive la cantine ! sur M6 n’a pu éviter de tomber dans l’idée toute faite malgré le ton décoiffant des propos tenus. Il y a maintenant vingt ans que les légumeries ont été supprimées en restauration de collectivité et cela pour des impératifs sur lesquels on ne peut revenir, la main-d’oeuvre coûte trop cher dans les pays développés.
La question de fond est la suivante : le surgelé est-il néfaste au goût et à la nutrition? Et la réponse ne peut être que négative. Il n’y a aucune raison technique pour qu’un bon légume, un bon poisson récolté ou pêché au meilleur moment soit dégradé par un bon processus de surgélation. Même chose pour une viande. Quant à la nutrition, il est évident que la surgélation ne charge pas les produits en graisse ou en sucre.
Alors, d’où vient le problème ? De raisons techniques et de raisons psychologiques. Raison technique : lorsque l’on se lance dans le surgelé pour diminuer le coût matières, on peut alors être amené à banaliser le produit et à acheter au moins cher, et l’on attribue la mauvaise qualité au produit en général et non au choix que l’on a fait d’acheter le moins cher et donc le moins bon. C’est une façon de renvoyer la faute à une fatalité extérieure, aux industriels en général, mais non à l’acheteur et aux décideurs de budgets. Deuxième étape : le surgelé n’est pas une façon de travailler sans effort. Il faut au contraire prendre certains soins pour que la cuisson ne souffre pas de la décongélation. Si l’on ne tient pas compte de ces contraintes par inexpérience ou par négligence, il ne faut pas ensuite rejeter la faute sur le produit mais sur l’opérateur qui n’a pas fait son travail.
Le surgelé est en fait un outil de l’amélioration des produits car il les saisit à leur meilleur moment et permet de les gérer au mieux dans leur transformation.
Les bons cuisiniers font des merveilles avec des produits surgelés et les mauvais s’en servent comme faux prétexte à leurs défaillances.