La restauration du troisième âge, comme les restaurations du secteur santé, a de bonnes raisons d’être diététiquement encadrée. Mais cet impératif a progressivement pris le pas sur tous les autres besoins. Les normes diététiques pour les personnes âgées s’accordent aussi mal à leurs envies et leurs attentes que celles qui régissent l’alimentation des enfants et des adolescents. Le résultat en est une perte d’appétence de cette population. Les responsables de restauration et les chefs en maison de retraite, de plus en plus sensibilisés à cette baisse d’appétit de leurs pensionnaires, commencent à remettre en question leurs menus et leurs recettes. L’objectif est de réintroduire plus fortement la notion de plaisir dans la cuisine.
Cet objectif n’est pas si facile à atteindre car la notion de plaisir s’accompagne d’une plus grande utilisation des saveurs et s’appuie sur plus d’éléments visuels : présentation ou spectacle.
Dans tous les cas, le retour du plaisir de façon régulière et significative implique davantage de travail, donc de coûts. La cuisine diététique de saveur oblige les chefs à rechercher des recettes plus complexes à réaliser, car les graisses et les sucres, qui sont les supports naturels des saveurs, leur sont limités. Les plats mis en oeuvre devant les convives nécessitent davantage de personnel que ceux préparés à l’avance.
Certains fabricants de l’agroalimentaire se sont penchés sur le problème pour apporter des produits adaptés à cette restauration spécifique. Mais ils sont peu nombreux à avoir consenti cet effort car, pour eux aussi, le problème n’est pas facile à résoudre. Leurs investissements en recherche et développement sont élevés pour un marché somme toute plus limité que les autres.
Les décideurs et les gestionnaires de restauration du troisième âge doivent savoir qu’ils n’ont pas le choix s’ils veulent accomplir leur mission : ils devront consentir des budgets suffisants sous peine de plonger la restauration des maisons de retraite dans une spirale déclinante.
Le plaisir a toujours coûté cher, mais il est vital.